Comment donner le goût de lire ?
Intervention dans le cadre du Salon du livre d’Antélias
Faite par Blandine Yazbeck
Conseillère pédagogique
Service de coopération et d’action culturelle
Ambassade de France au Liban
« La rencontre avec un livre, à tout âge, est comme la rencontre avec un nouvel ami : elle ne peut être imposée, mais juste suggérée » nous dit Marie Bonnafé, psychiatre et psychanalyste.
A une époque où, lieu commun, chacun peut constater que le multimédia prend une part de plus en plus importante dans la vie de nos enfants, la question de savoir comment leur donner (ou leur redonner) le goût de lire est une question importante loin d'être anecdotique. D'ailleurs, combien de parents, d'enseignants, d'éducateurs, se la posent chaque jour ?...
En préambule à cette interrogation, on peut tenter un autre questionnement : pourquoi une nouvelle technologie chasserait-elle automatiquement les méthodes plus anciennes ? Que l'on sache, la voiture n’empêche pas de marcher, pas plus qu'elle n'interdit de prendre sa bicyclette ou le train...
Et, tout en tenant le même raisonnement, on s’imagine mal trimbaler son ordinateur au lit, dans le bus ou sur le coin d'un banc public. Affirmons-le bien haut : le multimédia ne tuera pas plus le livre que la télévision n’a tué le cinéma. Mieux même, en stimulant la curiosité des utilisateurs, le multimédia pourrait bien les ramener au livre qui reste, convenons-en, le meilleur support du rêve, un support formidable et pour l'heure inégalé pour stimuler l’imagination.
Le livre demeure en effet un objet culturel privilégié que les autres médias, même excellents ne peuvent concurrencer (il n'est qu'à voir l'échec du livre électronique pour s'en persuader). Le livre, le vrai, celui en papier, avec une couverture et des pages qui se tournent, se froissent, se cornent, est un outil précieux et irremplaçable pour comprendre le monde qui nous entoure, pour se comprendre soi-même et entrer en relation avec les autres. Autrement dit, c’est un instrument de plaisir, de connaissance et de construction de soi.
Cependant, part essentielle de notre culture scolaire, il doit aussi et surtout devenir un objet familier. Pour le lecteur-débutant qu'est l’enfant, le livre est, au départ, un objet comme les autres, un "truc" que l'on va tripoter, renifler, mordiller, triturer, au grand désespoir d'adultes qui attendent un peu plus de respect vis-à-vis de ce qu'ils ont parfois, eux, tendance à sacraliser. Lentement le livre va néanmoins trouver un statut particulier aux yeux de l'enfant, et devenir un objet à part qui attire par sa couverture, ses jolies couleurs, ses belles illustrations... Le premier contact avec le livre est un élément de partage et d’échange avec le père ou la mère, le frère ou la sœur. Pendant que l’enfant s’abreuve des images, il écoute l’histoire, voit les mots joue avec l’écoute de ces mots et ce partage familial devient un moment de partage quotidien. L'enfant va s’approprier le livre et sa lecture, et progressivement il devient un véritable lecteur.
Actuellement, on trouve le livre dans l’environnement quotidien de l’enfant : à la maison, dans les librairies, dans les magasins, dans les bibliothèques publiques et certainement à l’école (en classe, à la BCD, au CDI),… Partout où cela est possible, le développement des bibliothèques-centres documentaires (BCD), mises en réseau avec le centre de documentation et d’information (CDI) du collège et d’autres bibliothèques municipales est un appui indispensable pour la promotion du livre et de la lecture. En effet, tous ces centres sont des lieux d’incitation au livre et à la lecture.
Mais alors, lire qu’est ce que c’est ?
Lire est un terme totalement polysémique qui peut notamment renvoyer :
- au déchiffrage du code écrit (sous-entendu lorsqu'on parle généralement "d'apprendre à lire") ;
- à l'oralisation d'un écrit (la lecture "à voix haute") ;
- à la recherche d'informations pertinentes dans un document écrit ;
- à un acte a priori "de plaisir" (lecture loisir…) destiné à se transformer en acquisitions dites "culturelles" ;
C'est sur ce dernier point, la lecture plaisir, que nous nous intéresserons plus particulièrement ici, sans pour autant chercher à occulter les autres sens du terme.
Lire est un acte individuel qui échappe à toute généralisation. Cet acte suffit à justifier une approche pédagogique destinée à donner le goût de lire aux jeunes. On ne commence pas à lire un roman, une nouvelle ou un poème parce qu’on cherche une réponse précise à une question précise.
Lire est un acte intime, que l’on pratique le plus souvent dans le secret de sa chambre ou de son lit, à son rythme propre. Le rapport qui s’établit entre le lecteur, le texte et l’auteur est unique.
Le verbe lire ne supporte pas l’impératif comme les verbes aimer et rêver, l’auteur Daniel Pennac l’a déjà bien dit dans son livre comme un roman où il défend la lecture-cadeau, la lecture gratuite et sans contre-partie. Dès qu’on utilise l’impératif, et qu’on explique à l’enfant les bienfaits des romans ou des livres en général, la volonté de lire s’envole et le loisir devient corvée. Il ne faut jamais imposer mais proposer. Il faut privilégier le plaisir au devoir. Et de citer encore Pennac : « la lecture est et doit avant tout rester un acte volontaire et surtout un acte de liberté. C’est un acte personnel pour tous ».
En 1992, Daniel Pennac, dans son essai Comme un roman (Gallimard, collection Folio), a proposé ses dix commandements du lecteur, ses "droits imprescriptibles" ou comment ne pas dégoûter un enfant de la lecture avant même d'en avoir pressenti les joies et les plaisirs :
1. Le droit de ne pas lire.
2. Le droit de sauter des pages.
3. Le droit de ne pas finir un livre.
4. Le droit de relire.
5. Le droit de lire n'importe quoi.
6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).
7. Le droit de lire n'importe où.
8. Le droit de grappiller.
9. Le droit de lire à haute voix.
10. Le droit de nous taire.
Quand un enfant n’a pas envie de lire, il ne faut pas en faire une montagne. La lecture ne doit pas être perçue comme une contrainte.
On ne lit pas pour faire plaisir à la maîtresse ou pour avoir une bonne note, on lit parce qu’on a envie de lire. Quand on vit la lecture comme un dialogue entre l’imaginaire et le texte, lire devient une sorte de passion ; on dévore, on ne parvient pas à sortir du livre avant de l’avoir terminé, on a l’impression, comme l’écrit Nathalie Sarraute, qu’un courant invisible nous entraîne.
Ainsi la lecture va au delà du plaisir : à travers un livre, l’enfant rencontre un imaginaire, une pensée ou une réalité différente qui font écho en lui. Et c’est comme cela qu’il se construit, qu’il construit sa personnalité.
Comment leur donner le goût de la lecture ?
Le but n’est pas seulement de leur apprendre à lire. C’est former des lecteurs qui continueront à lire à l’âge adulte et donneront cette envie de lire à leurs enfants.
L’école joue un rôle déterminant dans la réconciliation des jeunes avec la lecture. Elle doit les encourager et développer chez eux le plaisir de la lecture.
Elle doit motiver les enfants non pas seulement pour savoir lire mais aussi pour aimer lire.
En effet, le préscolaire permet de compenser les lacunes de certains enfants ne vivant pas dans un monde de lecteurs. Il fait découvrir aux enfants le plaisir de l’histoire. Le livre est à la portée de mains des enfants ce qui crée des attitudes positives surtout chez ceux qui n’ont pas eu au paravent de contact avec les livres chez eux.
Au primaire, à part les séances qui proposent l’apprentissage et le perfectionnement de la lecture, il existe un temps de lecture libre destiné à faire naître le besoin et le plaisir de la lecture.
Dans ce cycle, le prêt du livre et les animations ludiques proposées parallèlement à la BCD apparaissent comme un élargissement et un prolongement de ce qui se fait en classe. Ces activités favorisent la rencontre de l’enfant avec le livre. Dans ce cadre, le responsable de la BCD organise lui-même des actions de promotion de la lecture ou aide à leur mise en œuvre dans les classes.
Au complémentaire, de nombreux élèves, n’osent pas affronter la quantité de lecture que représente un roman prévu pour leur âge. Certains prennent le livre, ne le feuillettent même pas et le remettent sur le rayon. D’autres ne lisent pas parce qu’on ne leur présente rien qui corresponde à leurs attentes.
Ceci nous montre que si l’on veut réellement donner le goût de lire aux enfants, il faut prendre en compte un certain nombre de conseils :
- Leur proposer un choix très varié de livres, parce que nul ne sait par avance quel livre peut permettre à tel enfant de faire une rencontre décisive. Un fonds équilibré est constitué d’ouvrages de fiction (dont 30% albums et BD et 30 % romans, contes, poésies et théâtre) et de documentaires (+ 10% usuels) en proportion à peu près égale.
- Pour les romans la diversité est importante : les différents genres doivent exister : aventure, policier, science fiction, humour, etc. de même pour les contes : contes merveilleux, d’origine, d’animaux, etc.
- Ne pas censurer leur lecture, ou leur donner l’impression, par nos attitudes, que l’on réprouve tel ou tel livre, telle ou telle collection. Il a lu un album qui n’est plus de son âge ? peu importe, l’essentiel, c’est qu’il découvre le plaisir de la lecture.
- Les livres doivent être de niveau variés et de difficultés différentes car on ne peut jamais dire qu’un livre s’adresse à tel ou tel âge.
- L’histoire doit être captivante, leur proposer des livres qui s’adressent à l’imaginaire, sans oublier que les livres documentaires peuvent très bien s’adresser à l’imaginaire. Il y a des thèmes qui interpellent plus certains enfants que d’autres. (les garçons ont horreur des romans, ils préfèrent les livres qui parlent de voitures, de sport, les bandes dessinées). D’ailleurs, le livre est comme une fenêtre chacun y voit ce dont il a envie, ce dont il rêve.
- Le choix des documentaires ne doit pas se faire uniquement en fonction de leur utilisation pédagogique, l’enfant peut prendre ce livre pour son plaisir c'est-à-dire en vue d’une lecture plus personnelle. Il faut observer avec minutie l’exactitude et la richesse de l’information ainsi que la lisibilité et l’accessibilité du texte, Il faut être attentif à la mise en page, à la grosseur des caractères.
- Ne pas les contraindre à lire, même si l’on sait que bien lire est nécessaire à toute réussite sociale. (leur lire nous-mêmes), (les motiver en leur proposant de lire aux plus petits, ou leur suggérer de monter une exposition sur un sujet qui leur tient à cœur). En fait, il s’agit de laisser l’enfant lire avec le livre qu’il a choisi.
- Il faut éviter les livres de séries commerciales, limiter ce choix à 3 ou 4 titres par série (Martine, Le Club des cinq). Il ne faut surtout pas se focaliser sur les « classiques ».
- Ne pas enfermer les enfants dans une lecture obligatoire et cadrée, ceci détruit l’imaginaire et l’envie de l’enfant d’aller vers un autre livre.
- Ne pas les obliger à rendre compte de leur lecture sans autre finalité que savoir s’ils ont effectivement lu ou s’ils ont compris. On contraint souvent les élèves à faire des fiches de lecture pour vérifier ces 2 aspects et cette activité est forcément artificielle. C’est le meilleur moyen de dégoûter un enfant de la lecture (il faut les appâter, lancer un hameçon en proposant des rallyes lecture, des concours,….)
- Ne jamais briser le charme d’une lecture pour expliquer le sens d’un mot ou le sens de l’histoire (comme si l’on interrompait un concert par une leçon de solfège)
- Ne pas imposer à l’enfant un rythme de lecture comme on le fait en « lecture suivie ». pour les enfants qui n’aiment pas encore lire, cela renforce, dans leur esprit, l’association lecture et contrainte ; un argument de plus pour refuser de lire. Les enquêtes constatent que la moitié des enfants ne terminent pas un livre imposé en lecture suivie.
« La lecture est comme un escalier, chacun le monte à son rythme ».
- L’enfant a besoin de livres de qualité et non de livres médiocres et bêtifiants. Ainsi, il faut éviter d’acheter des adaptations, où souvent l’histoire est complètement tronquée (estropiée, altérée, coupée). (questionnaires = obstacles).
Par contre, il ne faut pas hésiter à acheter un très bon livre en 2 ou 3 exemplaires.
Il est nécessaire de choisir de bons livres et d’oser éliminer les mauvais livres et les livres usés ou périmés.
Pour remédier à tous ces problèmes et pour permettre un bon rapport à l’espace du livre, les concepteurs s’attachent de plus en plus aux structures d’avertissement : couvertures, illustrations, paratextes, typographie… et offrent à ces élèves une littérature de jeunesse, digne de ce nom, avec des auteurs, des œuvres et des genres différents. Pour améliorer le savoir-lire et l’aimer-lire, on s’appuiera sur cette littérature de jeunesse de qualité, riche de dizaines de milliers de titres, qui aidera à résoudre les problèmes de lecture chez les élèves.
Quant à l’enseignant, il doit s’attacher à maintenir et à développer le goût de lire en mettant en place des situations pédagogiques variées autour du livre et de la lecture.
Il doit lire des textes devant ses élèves, les relire, leur en faire lire. Il discute avec eux, les fait échanger autour de leur lecture changeant ainsi leur attitude face aux livres et à la manière de les aborder. Ceci rassure les élèves réticents.
La première nécessité pour donner le goût de lire aux enfants, est donc de faire en sorte qu’ils découvrent leurs propres motivations à lire en leur proposant des animations autour de la lecture.
Le premier rôle de ces animations est donc de faire lire les jeunes, de réconcilier ceux qui n’aiment pas lire avec les livres et de leur faire découvrir la multiplicité des textes de littérature de jeunesse.
Ces animations présentent une ou plusieurs des caractéristiques suivantes :
1. Donner des informations sur des livres
2. Faire lire des livres de littérature de jeunesse à partir d’activités ludiques
3. Faire lire en responsabilisant l’enfant
4. Donner aux jeunes les moyens d’approfondir la lecture1. Donner des informations sur des livres : Les animations d’information :
Ces activités sont destinées à rapprocher le livre de l’enfant, à lui donner le plaisir de lire. Elles informent sur les différents genres de livres aux thèmes variés et très divers quant à la présentation, au style, à l’épaisseur,…
On peut répéter plusieurs fois une animation d’information et d’une façon similaire.
o rapprocher la bibliothèque de ses lecteurs :
Il y a des enfants qui n’aiment pas lire, qui sont passifs vis-à-vis des livres. Voici quelques idées pour déplacer la bibliothèque vers eux :
Dans la cour de récréation, disposer quelques livres sur une table et la confier à un groupe d’élèves. Ceux-ci animent cette petite bibliothèque pour inciter d’autres élèves à emprunter les livres. Ceci amène un bon nombre d’élèves à fréquenter la BCD ou le CDI.
La même activité peut se faire devant une bibliothèque publique un jour de congé. Les bibliothécaires sont présentes pour encourager les enfants à feuilleter les livres et les emprunter. Elles pourront répondre à leurs questions ou leur donner des petits conseils sur leur choix.
Une association peut créer un nouveau lieu de lecture dans un quartier où il n’y a pas de bibliothèque.
o Créer une bibliothèque sonore en maternelle
Les enseignants réalisent les enregistrements des histoires. Les enfants tournent la page grâce à un signal sonore enregistré. Cette technique aide les enfants à devenir autonomes en feuilletant les albums qui accompagnent les enregistrements et leur donne envie d’apprendre à lire.
o La ronde des livres est une animation très simple et très motivante qui consiste à présenter aux enfants, périodiquement, et sans aucune obligation des livres de tous genres. Si les enfants trouvent qu’un livre n’est pas intéressant, il ne faut pas insister. C’est une activité qu’on peut renouveler chaque quinzaine ou chaque mois. La première fois la présentation se fait par la documentaliste ou l’enseignant, puis on peut proposer à des enfants intéressés par l’activité de la faire eux-mêmes.
o Les animations d’information et ludiques : les hors textes. Ces animations consistent à faire découvrir de nouveaux livres aux élèves. On leur propose des activités qui leur permettent d’anticiper sur le contenu du livre en utilisant les mentions de ce livre ou son paratexte :
1. 1ère et 4ème de couverture, il faut élaborer des hypothèses sur le contenu du livre. On peut aussi apparier les 2 couvertures.
2. exploitation d’un titre : les élèves sont répartis en groupes. A partir d’un tirage au sort, chaque groupe a le titre d’un livre et son auteur, puis il imagine en un quart d’heure l’histoire. Durant la mise en commun, l’animateur peut créer un suspense ou dire si le récit se rapproche de l’histoire ou pas.
3. exploitation de la table des matières : sans donner le titre du roman et à partir des titres des chapitres pris dans l’ordre chronologique, les élèves, par groupe, doivent écrire une histoire.
4. exploitation des catalogues : l’objectif est d’amener les élèves à consulter les catalogues, lire les titres et les résumés des livres proposés et constituer une liste de livres qu’ils aimeraient avoir dans leur bibliothèques. Le travail se fait par groupes. Une mise en commun peut être faite où on pourra demander à un élève de vanter à ses camarades l’un des titres qu’il a choisi.
5. le domino des livres : la règle du jeu est la même que celle dominos mais ça se joue avec les livres. Plusieurs possibilités se présentent pour apparier deux couvertures exemple même collection ou même auteur, le même mot dans le titre, le même personnage, etc.
D’autres activités :
o Présenter des livres à partir d’une fiche élaborée avec les enfants
o Associer table des matières et titres ou extraits des chapitres.
o Prévoir cinq ou six piles de 12 livres dont 10 ont un point commun, les 2 autres étant des intrus. Chaque pile est manipulée par un groupe d’élèves qui doit trouver le point commun et chasser les intrus. A la fin, chaque enfant peut repartir avec un livre. Cette animation est facile à organiser et adaptable à tous les niveaux. La même consigne peut être utilisée pour distinguer les différents genres de livres.
o Lire un extrait d’un livre et essayer de retrouver le livre dans une pile d’une dizaine de livre fiction ou documentaire.
o Proposer aux élèves, répartis en groupes, les illustrations d’un album dont ils doivent reconstituer le texte et le confronter avec le texte de l’auteur.
o Reconstituer un extrait ou un chapitre d’un livre dont les passages ont été mis en désordre. Bien choisir le texte pour qu’il donne envie aux élèves de lire, par la suite, le livre.
o Apparier titres et 1ère de couvertures.
o Apparier textes et illustrations d’un même album.
o A partir d’un jeu de mots fléchés, retrouver les titres de livres à partir d’un extrait.
2. Faire lire des livres de littérature de jeunesse à partir d’activités ludiques : Les animations ludiques :
Les animations ludiques sont des activités libres : les enfants ne sont pas obligés d’y participer. Ils constituent des groupes où s’établit une certaine complicité en même temps que la compétition avec les autres groupes. L’objectif des animations ludiques est de solliciter les jeunes à lire et non pas les contraindre, bien que l’une des règles du jeu oblige à feuilleter et à lire le livre. Une animation ludique peut être brève et ne pas se renouveler.
o La course à l’humour : Cette activité consiste à rechercher le maximum de textes drôles et en faire une exposition et/ou une séance de lecture. Les textes peuvent être des extraits de magazines, des articles de journaux, des extraits, de romans, de bandes dessinées,…. Cette activité peut se faire sur d’autres thèmes aussi.
o Le défi lecture : activité idéale pour inciter les enfants à lire un certain nombre de livres, d’établir des questionnaires et de les proposer à une autre classe qui a lu les mêmes titres et inversement. A la fin du projet, une journée « défi lecture » est organisée au cours de laquelle les 2 classes s’affrontent autour de jeux collectifs élaborés par les élèves.
o Mini- apostrophe : Il s’agit de recréer le plateau d’apostrophes en classe. Les élèves jouent le rôle des auteurs. Chaque participant lit un livre et se l’approprie suffisamment pour pouvoir en parler et répondre aux questions posées par l’animateur, rôle joué par un enfant. Le public peut aussi poser des questions écrites sur un papier adressé à l’animateur. Il faut rappeler que c’est une activité est libre c.à.d les participants sont volontaires, ce jeu étant une motivation et non une contrainte. Les livres qui sont présentés durant cette activité sont souvent empruntés.
o Organiser un concours de lecture : Ce concours peut être organisé par les enfants membres du club de lecture du collège. Les enfants choisissent un auteur ou un thème ou un genre. Ils décident du nombre de livres à lire. Pour chaque livre, il faut préparer une affiche. Ils élaborent aussi le règlement du jeu. Dans un premier temps, un questionnaire genre QCM est proposé à tous les participants. La finale rassemble les enfants ou groupes d’enfants finalistes devant un public constitué des classes participantes. On pourrait inviter l’auteur. Les vainqueurs peuvent gagner leur poids en livres ou tout autre lot qui les intéresserait.
o Le rallye lecture : (appelé aussi rallire, rallye littéraire,…) Des équipes sont mises en concurrence. Elles doivent se soumettre à des épreuves aux différentes étapes d’un itinéraire bien défini à l’intérieur de l’école ou à l’extérieur. Cet itinéraire est jalonné d’ateliers de lecture. Ce rallye lecture a pour objectifs : faire découvrir aux enfants un fonds de livres et faire rencontrer tous les partenaires concernés par la littérature de jeunesse. Les activités peuvent être du genre : trouver des objets en rapport avec un livre. Faire écouter aux joueurs des débuts d’histoire et ils doivent découvrir de quels livres ils sont tirés. Coller sur des fenêtres des mots du titre d’un livre qui sera reconstitué à la fin du parcours…..
o Le tour du monde en (80) livres : C’est un projet interdisciplinaire qui consiste à trouver un certain nombre de titres correspondant à différents pays à raison d’un livre par pays et proposer des activités dans les différentes disciplines.
o Le marque-page : L’objectif de cette animation est de savoir manipuler l’objet-livre. Inviter l’élève à choisir un album, le lire puis réaliser un marque-page qui doit être approprié exactement au livre choisi. Une fiche de questions sur le livre peut guider l’enfant dans son dessin.
3. Faire lire en responsabilisant l’enfant : Les animations de responsabilisation :
Les animations responsabilisantes sont proposées par un enseignant ou un documentaliste et les enfants s’y engagent volontairement. Donc, ils prennent une responsabilité donc une prise de risque aussi. Ainsi la probabilité de l’échec est la même que celle de la réussite.
On peut modifier ou développer une animation responsabilisante au fur et à mesure qu’elle s’élabore.
o Des grands lisent aux petits : cette animation s’adresse particulièrement aux enfants qui ont des difficultés de lecture. L’enseignant leur demande de présenter des albums à des petits du préscolaire ou du primaire. Les grands choisissent eux-mêmes les albums à la BCD ou répondent aux demandes des petits. Cette activité responsabilise les enfants vis-à-vis des petits, ce qui les motive. Ceci leur permet de faire des lectures qui correspondent à leur capacité sans toutefois les humilier. o Les enfants conseillers : l’objectif de cette activité est de motiver les enfants et créer des conditions pour que l’enfant ait envie de lire. Après avoir lu le livre, l’enfant rédige une fiche de lecture critique où il indiquera quelques informations concernant le livre et son appréciation. Un palmarès final représentant la synthèse des différents avis, est établi. Cette activité pourrait être aussi proposée avant l’achat des livres. On fait travailler les enfants sur les cata logues des éditeurs…
o Publier une revue de critiques : on peut aller plus loin et constituer une revue de critiques. Les enfants se mettent à plusieurs pour critiquer un livre, ce qui permet le débat. Si on a aimé un livre, on a la possibilité de le faire savoir au moyen de la critique. La règle est la suivante : faire le résumé du livre très court et un commentaire personnel. L’élève peut rédiger seul ou à plusieurs sa critique. Cette activité est très motivante pour les élèves en échec scolaire. Le fait d’avoir des textes publiés dans une revue les rend plus autonomes, les encouragent. Certains se mettent à lire rien que pour participer à la revue.
o Les enfants jury d’un prix littéraire : plusieurs classes peuvent participer à cette animation. Ils font une première sélection de 12 ou 15 livres. Chaque classe désignera son représentant au jury final composé exclusivement d’enfants. Ce jury choisira le ou les livres lauréats (un par niveau). L’objectif de cette activité est de susciter chez les enfants le plaisir de lire, leur donner la parole, les laisser donner leur avis, faire prendre conscience aux éducateurs sur les livres d’enfants. L’auteur du livre élu est invité pour la remise du prix. On peut organiser des rencontres avec différentes classes.
o Réaliser un clip vidéo pour présenter des livres : l’objectif de cette activité est de motiver les enfants à la lecture et de les initier au langage audiovisuel en présentant le livre à la manière d’un clip vidéo. Ceux-ci vont essayer de susciter le plaisir de lire chez leurs camarades. On peut accompagner ce clip d’une fiche guide.
o Organiser un café littéraire : les objectifs principaux de cette animation sont : développer une culture littéraire, développer le goût de lire, travailler la diction et l’écoute de l’autre, animer le fonds fiction du CDI et faire découvrir aux jeunes les livres de la littérature de jeunesse.
4. Donner aux jeunes les moyens d’approfondir la lecture : Les animations d’approfondissement:
Les animations d’approfondissement permettent de travailler sur la totalité de l’œuvre sans que leur objectif soit un exercice scolaire. Elles nécessitent que les enfants prennent conscience des différents niveaux de lecture du livre et de ses différentes entrées. Pour ces activités, on leur proposera différents genres de livre et aussi différents thèmes. On peut avoir recours à d’autres bibliothèques pour multiplier le nombre de livres. Et pour les convaincre que lire est un plaisir, il faut multiplier les animations autour de la lecture.
o Adapter un livre : transposer le roman en pièce de théâtre, en roman- photo, en spectacle de marionnette,… Une présentation au public valoriserait le travail des élèves et leur donnerait envie de lire et de participer à d’autres activités.
o Comparer un livre et ses adaptations : cette animation permet aux élèves d’approfondir leur lecture. Ils peuvent mettre en évidence ce qui est essentiel pour l’adaptateur. Ils peuvent aussi étudier de quelle manière l’adaptation a été réalisée. Ils peuvent aussi comparer un livre et sa traduction dans une autre langue.
o Livre vivant ou lecture spectacle: l’objectif de cette activité est de valoriser un livre et de le faire vivre pour un public spectateur. Tout d’abord il faut lire le livre en entier. Puis relire et sélectionner des paragraphes et phrases jugés essentiels en fonction du public visé de la structure dramatique du livre. En dernier lieu, déterminer les personnages choisir les liaisons musicales, répéter et évaluer à huis clos puis devant un public témoin et enfin évaluer et améliorer.
On peut aussi proposer le découpage d’un texte court pour une version vidéo ou une scène de marionnettes, la dramatisation d’un court récit qu’il faut réécrire sous forme de dialogue, la réalisation d’un voyage pour retrouver les lieux, la production d’un carnet de voyage, la réalisation d’une maquette.
o Présenter des livres sur le site de l’école ou autre.
Cette animation permet aux jeunes d’approfondir leurs lectures, mais les responsabilise aussi et leur permet de construire leur propre comportement de lecteur.
o Préparer la rencontre d’un auteur : Cette occasion peut donner lieu à de nombreuses activités de lecture destinées aux jeunes qui prendront du plaisir à lire les œuvres de l’auteur.
En voici quelques idées :
Interviewer un personnage de l’un des livres de l’écrivain.
Inventer une biographie, à partir d’indices figurant dans ses ouvrages.
Imaginer le portrait de l’écrivain à partir de notices biographiques (chercher ce qui le caractérise, le rend original),
Faire une recherche bibliographique (catalogues d’éditeurs, sites Internet,…),
Produire des affiches ou des slogans au CDI incitant à lire un livre,
Proposer un mini « défi lecture », ou un mini « apostrophe ».
Réaliser un journal collectif concernant la venue de l’auteur.
La finalité de ces animations est de donner le goût de lire aux jeunes. Ce serait intéressant de les insérer dans une stratégie pédagogique globale. Ainsi on pourrait enchaîner plusieurs animations de différentes catégories. On pourrait varier les entrées en lecture ou renouveler une même activité que les enfants ont appréciée, et il faudrait surtout établir une progression qui permette aux faibles lecteurs d’entrer en lecture.
En conclusion, que l’animation de lecture que nous proposons soit ludique où l’on propose aux enfants de lire pour jouer ou responsabilisante en confiant une certaine responsabilité à l’enfant envers d’autres personnes, celle-ci a pour objectif principal de réduire l’écart entre l’enfant et la lecture en créant une motivation qui l’incite à aller vers le livre. Ainsi, en lui permettant d’apprendre à aimer lire, l’enfant devient un citoyen autonome, responsable, capable de faire des choix, de respecter la différence, de se construire donc de grandir.
BIBLIOGRAPHIE
· Poslaniec C., Houyel C..- Activités de lecture à partir de la littérature de jeuness.- Hachette-Education, 2000
· Poslaniec C. et un groupe d’auteurs.- 10 animations lecture en bibliothèques jeunesse.- Retz, 2007
· BUTLEN Max, COUET Madeleine, DESAILLY Lucie.- Savoir lire avec les BCD.- CRDP Créteil
· CASSAGNES P., GARCIA-DEBANC C., DEBANC J.-P.- 50 activités pour apprivoiser les livres en classe ou en BCD.- CRDP Midi-Pyrénées, 2004
· BORDET Geneviève, LORRANT-JOLLY Annick.- Projets-lecture au cœur du CDI.- CRDP Créteil, 1996